CHATUZANGE



Lacroix : Statistiques du département de la Drôme 1835



CHATUZANGE



CHATUZANGE. - Cette commune, dont la population est de 1,737 individus, est formée de plusieurs hameaux ; elle est à 7 kilomètres de Romans et 20 de Valence. Son territoire, borné au nord par la rivière d'Isère, présente une culture riche et variée, de belles plantations et des sources qui fournissent d'abondans arrosages. Les principales productions sont les grains, les fourrages, le vin et la soie. Les habitans ne font aucun commerce. Le hameau le plus considérable après Chatuzange est Pisançon, dont l'ancien château, situé sur l'Isère, devint un fief avec un territoire, et fut plus d'une fois un sujet de guerre entre les seigneurs qui se le disputèrent sous le régime féodal. On lit, entre autres, le fait suivant dans l'Histoire générale de la province :
« Silvion de Clérieux et Lambert de Chabeuil étant seigneurs de Pisançon, s'en partagèrent le château en 1271, et fortifièrent la part échue à chacun. D'un château ils en firent deux, et étant devenus ennemis, ils assiégèrent le château l'un de l'autre. Guy d'Auvergne, archevêque de Vienne, comme seigneur supérieur, à cause de l'abbaye de Saint-Barnard, leur ordonna de les lui remettre, pour en éviter la ruine.
Lambert refusa d'obéir ; il s'empara même du château de Silvion, où l'abbé de Saint-Félix était entré pour l'archevêque. Cet acte de félonie donna lieu à l'archevêque de le priver de son fief : il le donna, en 1274, à Humbert de Latour, qui se rendit maître de la place. Humbert posséda paisiblement Pisançon tant que l'archevêque vécut. A sa mort, l'évêque de Valence, Amédée de Roussillon, qui avait traité avec Silvion et qui était devenu administrateur de l'archevêché de Vienne, y fit assiéger Humbert ; mais il se défendit si bien que le siége fut levé ; on lui fit des propositions, et l'affaire traînant en longueur, il devint si puissant que ses adversaires n'osèrent plus l'inquiéter. »
C'est ainsi que ce château était devenu la propriété des dauphins. Il appartient aujourd'hui à M. le marquis de Pisançon, mais ce ne sont plus que des ruines. La famille de Pisançon l'a depuis long temps abandonné, pour en bâtir un autre à quelque distance de là dans une situation plus belle et plus spacieuse. Au château moderne est joint un très beau parc, bordé d'un côté par une longue muraille et de l'autre par l'Isère, vers laquelle il descend en amphithéâtre dans une très heureuse et très agréable position.
Ce parc est séparé par un ravin du domaine de Rioussec, qui fut la maison de plaisance de M. l'abbé de Tancin, lorsqu'il était chanoine de Saint-Barnard.
La dignité de sacristain était alors la première du chapitre : elle vint à vaquer, et elle fut demandée par l'abbé de Tancin, à qui on la refusa. Il en eut tant d'humeur, qu'il remit au chapitre la démission de son canonicat, et vendit à M. Lacroix-de-Pisançon, président au parlement, sa propriété de Rioussec. C'est de là qu'il est parti pour aller rejoindre à Paris sa soeur, la religieuse de Tancin, qui avait aussi abandonné le couvent de Montfleury pour un plus grand théâtre, où elle se distingua par son esprit, et où elle aida si bien son frère, que, sous le règne de Louis XV, l'abbé de Tancin devint ministre secrétaire d'état, cordon bleu, pair ecclésiastique et cardinal. C'est ainsi que la fortune lui refusa d'abord une petite place, pour le conduire plus tard, comme par la main, à la plus brillante du royaume et la plus élevée de l'église gallicane.

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